Taverne du Loup Blanc

5. ( avant le Palais des Glaces)

Enigma: Silent Warrior

La nuit était douce dans la vallée au cœur d’Asgard. Tout semblait si paisible, si calme, mais les trois sœurs savaient parfaitement que cela n’était que trompeuse apparence. Car si dans les vallées perdue du pays, tous semblaient dormir, il y avait une armée qui se levait, une armée qui se préparait à frapper avec une force incomparable jusque là, un ennemi encore mystérieux pour l’instant. Razor avait rapporté la rumeur jusqu’aux oreilles de Freyja, alors que le char des trois Valkyries approchaient de la plus importante des cités du pays, Gladsvoll, parfois encore appelée la citadelle des Ases d’après les croyances nordiques.

Les lumières brillaient encore aux fenêtres pour cette cité qui ne connaissait que rarement le repos. Accueillant des voyageurs de tous les pays, elle était le cœur d’Asgard. Et si les Valkyries voulaient un peu d’animation, il n’y avait que Gladsvoll qui pouvait la leur offrir. Peu de milice chez les vikings si ce n’était le chef de chaque tribu qui établissait ses propres lois, toujours en accord avec la religion, avec des préceptes enseignés depuis des millénaires…

Ainsi tous ici, connaissaient la légende des Valkyries et savaient qu’elles vivaient là haut sur les plateaux des glaces éternelles. Tous savaient aussi que quand les trois guerrières venaient parmi eux, il leur fallait les accueillir avec la déférence due à leur rang.. elles étaient des déesses, elles étaient leurs gardiennes à tous.

Quand l’attelage des six chevaux noirs parvint à l’entrée de la ville, sans ralentir l’allure, tous s’écartèrent partagés par l’effroi et le respect qu’il convenaient de montrer à ces femmes. Elles effrayèrent ainsi bon nombre de paysans et voyageurs venus profiter de quelques heures de détentes. Puis enfin, devant la façade d’une taverne, les chevaux pilèrent net en renâclant et tous se tournèrent pour voir descendre du char, les trois femmes de la légende… Thrud bondit sur le sol avec souplesse, adressant un sourire éclatant aux badauds, déjà impatiente de montrer de quoi elle était capable. Sigrun la suivit, superbe de grâce dans son manteau de fourrure blanche, mais glaçant tous les curieux de son seul regard violine. D’instinct, ils reculèrent devant l’expression de Sigrun, n’osant à peine murmurer quelques commentaires entre eux.

Puis ce fut Freyja qui descendit du char, avec ses manières souples et félines qui ralluma dans le regard des hommes présents, cette étincelle d’intérêt. Elle leur sourit à tous, doux sourire d’ange qui cachait sa véritable nature, ce sourire qui suffisait parfois à mettre un homme à genoux.. C’est elle qui parla, d’une voix veloutée, sans forcer, mais suffisamment claire pour que tous l’entendissent.. Le silence s’était fait rapidement en voyant qu’elle allait prendre la parole.

- Mes chers amis…peuple adoré.. Nous voilà à nouveau parmi vous…

Freyja it quelques pas de plus, s’avançant au milieu du cercle formé par les curieux.

- nous savons qu’Asgard se prépare pour une grande bataille.. hm.. et cela nous a fort attristé que vous ne nous ayez pas convié à la fête!

Il y eut quelques remous parmi la foule quand une personne s’avança… Un petit homme bien replet qui affichait un grand sourire, mais qui ne cachait pas son inquiétude. Allaient-elles les punir pour ne pas les avoir mis au courant de cette bataille qui se préparait? en fait, tout cela se faisait au secret, mais personne ne pouvait avoir de secret pour les Valkyries. Seulement le fait qu’elles puissent songer un seul instant qu’ils avaient voulu le leur cacher les mettait fort dans l’embarras.

- bonsoir!!! C’est que nous ne voulions pas vous déranger et.. peut-être que vous aviez des tâches plus importantes à accomplir… mais à présent que vous êtes là, si vous nous faites l’honneur de nous assister dans cette bataille, alors nous vous en serions éternellement reconnaissant. Mais venez, allons parler de tout ça à l’intérieur de cette taverne ! Je me ferai une joie de vous expliquer ce qu’il va se passer..

L’homme s’avança au devant de Freyja qui le toisa de son regard glaciale puis après qu’il eut marqué une hésitation, seulement à ce moment, son visage se transforma pour lui sourire et elle daigna le suivre ainsi que ses sœurs.

6. "Portsmouth"

La fête battait son plein. Et pendant qu’à la table d’honneur, le chef du village expliquait aux Valkyries, ce qu’il en était de cette guerre qui se préparait, le peuple en profitait pour s’amuser. Des ménestrels et trouvères de passage, s’étaient installés dans un angle de la vaste salle et entamèrent un joyeux air bien entraînant. Une flûte dominait le son d’autres instruments et bientôt, tambours et tambourins marquèrent le rythme. Les vikings présents eurent vite envie de profiter de cette animation. Les tables furent écartées et les danseurs se mirent en place, tentant plus ou moins adroitement de faire quelques pas, mais l’envie de s’amuser était là et sur leurs visages, on pouvait y lire la joie que leur prodiguait cet exercice des plus particuliers.

Et alors qu’une chorégraphie étonnante prenait place au centre de la pièce, un grand guerrier s’approcha de la table principale, et tendit la main à Thrüd. Celle-ci d’abord étonnée de l’invitation fut ravie finalement de pouvoir peut-être s’amuser un peu. Elle accepta donc l’invitation, ôta son casque pour le poser sur la table et sous le regard perplexe de ses deux sœurs qui se turent pour observer la suite des évènements, Thrüd bondit par-dessus la table pour rejoindre le rang des danseurs.

Elle s’aligna comme eux, face à ses sœurs. Puis alors que les danseurs reprenaient de plus belle la chorégraphie, Thrüd observa et les uns et les autres, et commença à imiter les pas des danseurs. Ils avançaient tantôt d’un pas, puis reculaient, en frappant des mains, frappaient leurs cuisses, et enfin leur dos, avant de glisser le bras sous celui du voisin et d’entamer quelques tours de pistes, dans une joyeuse gigue. Puis les pas reprenaient en avant et en arrière, un coup à gauche, un coup à droite. Les danseurs ensuite frappaient avec de plus en plus d’entrain dans leurs mains, sur leurs cuisses et enfin dans le dos de leurs voisins. Puis après chaque tour de piste, les danseurs échangeaient les partenaires.

Mais Thrüd avec son entrain habituel, mit bientôt un peu trop de vigueur dans ses gestes et alors que recommençait la ronde des claques, celle qu’elle assena à son voisin de droite fut si violente que ce dernier trébucha en avant. Trouvant le fait plutôt amusant, Thrüd éclata de rire, se tourna à sa gauche et en fit de même avec son autre voisin qui déjà roulait des yeux, craignant le pire de la part de la Valkyrie.

Un léger désordre se créa au milieu de cette troupe de danseurs. L’homme malmené par la valkyrie, n’avait pas apprécié le geste, et quelques bières de trop lui avaient fait oublié qui elle était et quels risques il prenait à vouloir lui rendre la pareille.. Ainsi le danseur écarté de la chorégraphie reprit son rang et assena à son tour une belle claque sur le fond des reins de Thrüd. Celle-ci poussa une exclamation surprise qui résonna dans toute la taverne, et lui assena une gifle retentissante. L’autre recula sous le choc en se tenant la joue, mais voulut encore une fois lui retourner le geste. Seulement prompte comme l’éclair Thrüd le regard brillant de malice et qui visiblement s’amusait beaucoup, s’était baissée pour esquiver le coup. Et alors qu’autour d’eux le plancher vibrait sous les pieds des danseurs, Thrüd saisit le bras de son partenaire improvisé pour le faire tourner comme dans la chorégraphie initiale. Sauf qu’elle y mit bien plus d’élan et que le pauvre gars se retrouva soudain projeté à plusieurs mètres, alors que la guerrière venait de lâcher prise.

Mais elle n’en avait pas encore fini. Elle saisit le bras d’un autre partenaire et le fit tourner très vite avant de lâcher prise et de l’envoyer à nouveau dans le décor. La troupe de danseur se transforma soudain en une mêlée de combattants qui avaient pris le même pli de ne plus juste se frapper les cuisses, mais de frapper son voisin. Les coups et les cris retentissaient au milieu de la joyeuse musique des imperturbables ménestrels qui se penchaient de temps en temps pour éviter des objets jetés à travers la pièce.

La fête allait rapidement tourner court, et à leur table, Freyja et Sigrün échangèrent un regard entendu avant de soupirer. Leur sœur avait finalement trouver le moyen de s’amuser…

Après la fête, après la danse, et après s’être bien bataillé le temps d’amuser ce qu’il fallait la valkyrie blonde au corps étonnamment musclé, les choses reprirent un cours plus calme. L’on réinstalla les tables et ce fut reparti pour quelques beuveries. Avec l’endurance des guerriers vikings, avec l’entrain qui leur était coutumier, et peut-être avec un peu de chance, la fête durerait jusqu’à l’aube.

A la table du chef de ce village, Freyja considérait avec condescendance le remue ménage de ces hommes et femmes qui se réinstallaient à leur table, Thrüd assise en bonne place parmi eux. Son sourire témoignait qu’elle passait une bonne soirée ce qui arracha à la jeune femme aux cheveux couleur aile de corbeau, un soupir soulagé. Elle pouvait à présent songer à parler avec l’homme à sa gauche, tandis qu’à sa droite, Sigrün était restée complètement stoïque tout au long de cette soirée, ne montrant aucun intérêt, ni pour la musique, ni pour la danse, ni rien de ce qui concernait cette fête. Freyja n’avait pas besoin de lui parler pour savoir à l’expression de sa sœur qu’elle aurait préféré être ailleurs.

Pourtant il y avait des sacrifices nécessaires afin que les trois sœurs continuassent de vivre en paix dans leur palais de glace. Et cette paix était bien fragile si toutes trois ne consentaient pas de temps en temps à satisfaire à l’une ou l’autre des exigences de chacune d’entre elles. Mais il y avait aussi une autre bonne raison à leur présence, et c’était là le second intérêt de ce voyage, Freyja voulait en savoir plus au sujet de ces rumeurs que lui avait rapportées Razor. Le fait que personne n’eut jugé bon de les informer de cette guerre qui se préparait, ne lui plaisait pas du tout. Freyja ne voulait pas être tenue à l’écart des projets d’Asgard de quelque manière que ce fut. L’ignorance était le pire des fléaux pour les valkyries et surtout pour leur avenir.

C’est d’une voix de miel qu’elle s’adressa à l’homme replet et à la longue moustache qui représentait l’autorité dans ce village:

- A présent que les choses se sont calmées pour nos chers amis, si vous me parliez un peu de cette guerre qui se prépare?

L’homme posa un peu précipitamment sa chope à moitié vide, et s’essuya du dos de la main la mousse qui ornait sa moustache.

- Pour l’instant, comme je vous l’ai déjà dit, tout se passe dans le plus grand secret et..
- Je l’avais remarqué, merci!

Le chef prit quelques couleurs et s’éclaircit la voix pour se redonner contenance sous le regard lourd de reproche de Freyja.

- En fait voyez-vous, moi-même suis très peu informé de ce qui se trame parmi les rois de nos contrées, et puis si certains ont pour projet d’envahir Utopia, le projet ne fait pas l’unanimité.

Freyja fronça les sourcils, intriguée par ce qu’il lui révélait.

- Utopia? Mais pourquoi? et certains seraient contre cette guerre? Mais alors est-elle déjà en préparation ou non?
- ma foi oui, des armées se préparent déjà, mais certains chefs ne comprennent pas l’intérêt de cette guerre et préfèrent continuer de piller les régions voisines des nôtres.
- hm je vois, c’est en effet la voie la plus facile.

Freyja se recula contre sa chaise. Elle savait d’expérience que le chemin le plus facile n’était pas toujours celui qui apportait le plus de satisfaction. L’homme qui avait décidé de diriger ses armées sur Utopia devait avoir une bonne raison.

- Et savez-vous ce qu’il va se passer, puisque cette guerre n’obtient pas l’approbation générale?
- tous les chef de toutes les contrées sont appelés à participer au grand conseil extraordinaire qui va avoir lieu à la prochaine lune, pour en délibérer. Et j’ai appris que le nouveau roi y sera.

Freyja se retint de sursauter et masqua à grand peine sa surprise.

- Un nouveau roi?
- oui de l’Asgard septentrional et certains prédisent déjà qu’il deviendra un grand roi et qu’avec lui Asgard retrouvera la gloire et la puissance.

Freyja haussa un sourcil perplexe. Ces paroles dans la bouche de cet homme semblaient bien incongrues, pourtant ce genre de prophétie ressemblait tant aux rumeurs qu’elle avait aidé à se répandre dans tout le pays. Des rumeurs et une légende qui concernait les Valkyries, des rumeurs qu’au départ aucun Viking ne voulut croire mais qui après quelques péripéties et évènements extraordinaires minutieusement prévus, apportèrent foi à cette légende. Ainsi les valkyries dans ce monde avaient pris le visage de trois belles jeunes femmes, intelligentes, rusées, et puissantes que tous craignaient désormais d’affronter.

Et voilà qu’un homme surgi de nulle part, semblait emprunter les mêmes voies. Seulement l’ambition démesurée de Freyja ne pouvait laisser de place à quelconque concurrence. La colère masqua la crainte dans son regard, la crainte de perdre tout ce qu’elle avait si durement construit pendant ces longues années, qu’elle avait chèrement payé par un isolement forcé, tout cela afin de devenir des femmes déesses au pouvoir immense et jamais contesté…. Jusqu’à ce jour, jusqu’à ces paroles qui résonnaient comme une prophétie, une menace pour les Valkyries.

Freyja serra son poing si fort que ses ongles strièrent de rouge la paume de sa main. Elle ne laisserait pas ce roi la priver de quelque chose qui lui revenait, l’entier mérite de tout ce qui pouvait arriver de bien aux vikings. Si ceux-ci auraient un roi pour les remercier des bonnes choses qui leur arrivaient grâce à lui, plus personne ne rendrait grâce aux Valkyries et peu à peu elles perdraient de ce pouvoir qu’elles possédaient sur le peuple. La jeune femme se retint de frapper la table de son poing, au lieu de quoi, elle répondit au chef, d’une voix légèrement transformée par la colère:

- Trop de gloire et trop de puissance ont mené plus d’un peuple à leur perte. L’homme doit apprendre à se contenter de ce qu’il possède, sans désirer ce que possède son voisin.

Le chef la dévisagea, les yeux ronds, sans comprendre vraiment le sens de ces paroles bien mystérieuses pour lui

- Ce qui veut dire que vous êtes contre cette guerre?

Freyja tourna son visage vers le petit homme et lui adressa un tel regard que le chef eut envie de disparaître sous terre.

- Ce qui veut dire que nous serons présente lors de ce grand conseil. Nous voulons voir à quoi ressemble ce fameux roi, mais nous voulons surtout que désormais le moindre évènement, la moindre information nous soit rapidement rapporté.
- euh oui mais vous avez interdit.

Freyja s’était déjà redressée, imitée aussitôt de Sigrün qui avait suivi toute la conversation et de Thrüd qui avait vu la colère sur le visage de sa sœur.

- Je sais.. nous avons interdit à quiconque d’approcher notre royaume dans les hauts plateaux. C’est pourquoi, demain matin, je veux tous les meilleurs guerriers de ce village sur la place. Je choisirai parmi eux qui deviendra notre messager personnel. ..

Un murmure d’effroi se répandit dans la vaste pièce. Tous connaissaient les milles dangers que cet homme aurait à affronter, et tous craignaient d’être choisi. Freyja le savait parfaitement, c’est pourquoi elle ajouta.

- Le guerrier qui sera choisi deviendra à jamais, un héro et son nom sera perpétré dans les légendes d’Asgard. Nous veillerons sur chacun de ses pas et lui épargnerons les dangers que tout homme aurait normalement à affronter. A présent mes sœurs et moi aimerions nous retirer.

Freyja jaugea tous ces gens autour d’elle, d’un regard sévère et quitta la salle à la suite d’une jeune femme qui fut chargée de les mener jusqu’à la pièce aménagée à leur intention et qui leur permettrait de se reposer cette nuit.

8.

Au lendemain matin, alors que les trois valkyries peu à peu émergeaient de leur sommeil, le chef sur la place du village avait réuni ses meilleurs hommes. Il savait qu’elles choisiraient le meilleur parmi eux, aussi craignait-il de voir ce guerrier quitter le village qui avait besoin de chacun de ces hommes, tout comme il était fier de savoir que l’un d’eux serait choisi par les valkyries. Car c’était un grand honneur pour leur village de pouvoir ensuite l’annoncer aux hameaux alentours.

Quand la première des trois sœurs se présenta hors de la maison qui les avait recueillies pour la nuit, tous les regards se fixèrent sur les Valkyries et les conversations cessèrent pour se muer en murmure puis en silence. Freyja la première, s’avança revêtue de son lourd manteau de vison noir. Ses yeux si bleus dans ce visage d’ange à la peau aussi blanche que la neige, se posèrent sur le chef du village. Une fois arrivée à ses côtés, la jeune femme dévisagea tour à tour, les guerriers qui lui faisaient face. Sigrün resta légèrement à l’écart, tout aussi impressionnante dans son manteau de fourrure blanche, ses cheveux flottant sur ses épaules, avec tant de légèreté que le moindre souffle de vent les faisait danser. Quand à Thrüd, elle s’était campée à côté de Freyja, bras fermement croisés sous sa poitrine, arborant pour seul vêtement, son éternelle tenue en cuir qui semblait lui suffire pour la protéger du froid. Elle souriait, se réjouissant de pouvoir aider sa sœur à choisir l’heureux élu.

Et dans ce silence glaciale, Freyja comme à son habitude pris la parole au nom des trois Valkyries :

- Je vois chef Olrik que vous n’avez pas oublié ma requête. Voilà qui me fait grandement plaisir.

Freyja lui accorda un sourire, mais ses yeux restaient de glace. Cependant, l’homme fut touché par le compliment oh combien flatteur de la part de l’une des valkyries. Il s’inclina devant elle en répondant.

- Je n’aurais pu manquer à une parole donnée à nos chères Valkyries. J’espère que votre nuit a été bonne ?
- excellente merci ! répondit Thrüd avec son enthousiasme habituel.
- Alors voilà vos meilleurs hommes ? Enchaîna Freyja tout en faisant un pas vers le premier rang des guerriers.
- oui, les meilleurs ! Ceux-là sont prêts à vous servir mesdames, et à affronter tous les dangers afin de remplir leur mission.

Oui enfin il extrapolait peut-être un peu, surtout si l’on en jugeait par l’expression de certains dont la peur hantait leur regard. Ce qui n’échappa pas à Freyja qui s’arrêta devant chacun d’eux, semblant de son regard transpercer leur âme. Ceux qui osaient le croiser, baissaient aussitôt les yeux, arrachant à Freyja un de ces mystérieux sourires. Un sourire qu’elle arborait encore alors qu’elle passait devant un autre guerrier qui lui, ne montra aucun signe de peur. La Valkyrie s’arrêta et le fixa pendant quelques secondes, mais l’homme ne cilla pas ; il regardait droit devant lui. Grand, menton volontaire, il se tenait fièrement, et voyant son regard déterminé, Freyja devina la force de ce guerrier et toutes les qualités qu’il devait posséder.

- Quel est ton nom, mon brave ?
- Arvid Langström.

Le sourire de Freyja s’accentua.

- un aigle dans la tempête…ça me plait beaucoup, et à toi Sigrün ?
- espérons qu’il ne perde pas ses plumes quand il quittera le nid.

Freyja rit et jeta un coup d’œil à sa sœur qui elle savait, ne plaisantait pas. C’était plus une mise en garde, mais l’image lui plaisait tout de même. Thrüd n’y tenant plus, avança.

- Il faudrait qu’il nous montre s’il sait se battre, non ?

Ce fut au tour d’Olrik d’intervenir. Il ne tenait pas à ce que l’on abimât son meilleur guerrier.

- Je pensais qu’il devait juste être votre messager ?
- oui bien sûr.
- oh mais il faut qu’on soit sûr qu’il sache affronter les pires dangers, n’est-ce pas Freyja ?
- oui, mais ne t’inquiète pas Thrüd, je suis persuadée qu’il est capable de prouesses et puis j’ai confiance dans la parole de chef Olrik. S’il dit que c’est son meilleur guerrier !

Olrik agita la tête pour approuver les paroles de la Valkyrie, dévisageant tour à tour Freyja et Thrüd.

- Voilà une bonne chose de réglée, mes sœurs, nous pourrions rentrer à présent ?

Freyja et Thrüd dont le visage ne cachait pas sa déception, se tournèrent vers Sigrün qui avait sifflé les chevaux, ramenant à elles, l’étincelant char des Valkyries.

- Tout à fait Sigrün. Il est temps. Chef Olrik, soyez remercié pour votre hospitalité, les dieux s’en souviendront. Quand à toi, Arvid, nous sommes impatientes de recevoir des nouvelles au sujet de cette guerre. Chef Olrik ?
- oui ?
- N’hésitez pas à nous l’envoyer, dès que vous aurez du nouveau.
- oui, c’est promis.

Freyja sourit puis monta dans le char à la suite de Sigrün qui déjà avait saisit les rênes, tandis que Thrüd regardait une dernière fois avec envie, ces jolis rangs de guerrier. Elle soupira et finit par rejoindre à son tour, ses deux sœurs. Un cri perçant retentit dans le village, Sigrün venait de donner l’ordre aux chevaux de se mettre en route.
Et tandis que le char s’éloignait, entraîné par le puissant galop des chevaux à la robe noire, Thrüd cria encore à l’intention des vikings.

- Nous reviendrons vous voir, à bientôt !!

( A suivre au Palais des glaces)