Le Palais Sélam

30.

Jared se sentait coupable alors que Kasuke suivait la tête basse cet homme, ce capitaine qui était donc son époux. Il aurait du faire quelque chose, essayer d’intervenir mais le sultan l’en avait dissuadé. Cela ne ferait que lui apporter plus d’ennuis qu’il n’en avait déjà . Et il avait raison, mais le prince ne pouvait se résoudre à la laisser repartir sans au moins lui dire un dernier mot.
C’est pourquoi brusquement, alors que la porte s’était déjà longtemps refermée sur les sunlaoistes, il se précipita au dehors, traversa les couloirs et rejoint le groupe alors que ces derniers se retrouvaient dans la cour devant le palais.

Tous se retournèrent, déjà main sur la poignée de leur épée, prêts à intervenir alors que Jared lui, ne se préoccupait que de Kasuke.

- Kasuke !
- Prince Jared ?!!
- il fallait que je vous parle une dernière fois avant votre départ.

Kasuke eut un regard alarmé qu’elle posa tour à tour sur le prince et sur son époux.

- il me faut l’assurance de savoir que tout va bien se passer pour vous. Sinon j’aurai pour toujours mauvaise conscience de vous avoir mené jusqu’ici.
- Vous n’avez pas à vous inquiéter, cet homme est mon époux, je suis sa femme, ainsi est faite la vie. J’ai commis une erreur moi-même en m’éloignant de mon pays, mais à présent je vais tout faire pour la réparer.. Comme vous, prince Jared, retournez auprès du sultan et faites ce que vous m’aviez promis.. Il faut éviter les conflits, la paix est préférable à la guerre.

Puis se tournant vers son époux qui fusillait du regard, elle lui adressa un sourire contrit.

- Nous pouvons y aller à présent, le prince tenait à me faire ses au revoir, dans les formes. N’oubliez pas ce que je vous ai dit, Prince Jared, la paix est préférable aux conflits… Adieu !

Et devant un prince figé par ces dernières paroles, l’escorte de sunlaoistes et Kasuke passèrent les portes de l’enceinte du palais.. Alors Jared sut qu’il ne la reverrait sans doute jamais.

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10.

Le sultan poussa un soupir. Ce prince n’en ferait jamais qu’à sa tête, mais bon s’il s’attirait des ennuis avec Sunliao, ce n’est plus lui qui était concerné. A présent il pouvait passer à autre chose et se dit-il, Semoa pourrait rappeler ses femmes afin de poursuivre là où ils en étaient restés avant l’arrivée de Séreste. Mais ce fut au tour de son fils Khesce de demander audience.. Quoique Khesce se contenta simplement d’entrer dans la grande salle sans demander rien à personne. Mais à part un grognement contrarié, Semoa ne s’en formalisa pas.

- Père !
- oui, quoi encore ?
- avez-vous eu des nouvelles de Sahar ?
- non Keshe, c’est seulement la vingtième fois que tu me le demandes cette semaine. Laisse donc le temps à Sekret de la retrouver !

En fait Semoa se fichait bien de retrouver cette femme, lui ce n’était que la perle qui l’intéressait. Mais il avait prétexté retrouver cette femme, d’une part pour avoir la paix, enfin c’est ce qu’il croyait alors, et d’autre part, pour ne pas avouer le véritable but du voyage de Sekret. Car Allah seul savait comment, mais Khesce avait fini par apprendre que le sultan avait fait libérer l’espion et l’avait envoyé sur une nouvelle mission.

Ainsi le sultan Suliman avait décrété que voyant son fils si malheureux, il avait envoyé l’espion sur ses traces, afin de ramener la jeune fugitive.. Seulement, le sultan ne pouvait pas se douter que la perle était avec Sahar, en ce moment même.

- Je suis inquiet père, personne ne sait où elle a pu aller.
- Khesce mon fils !

Semoa glissa son bras sous celui de son fils et sur le ton de la réprimande lui dit :

- Tu devrais oublier cette femme ! Elle ne t’a apporté jusque là que des soucis ! Et franchement Kheshe, imagine tu seulement un instant cette femme dans la famille ? Allez, tu devrais aller un peu t’amuser, et profiter des plaisirs que nous offre la vie, et …les si jolies femmes de Djamila, hm ?
- je ne peux l’oublier, père.
- Rohh, un peu de bonne volonté !! tiens, et si tu allais voir Ankhor'Loui, pour voir comment avancent mes merveilles?

Khesce l’air toujours aussi lugubre qu’en arrivant, hocha la tête et lassa son père. Un grand sourire s’épanouit sur le visage du sultan qui pensait enfin avoir la paix. Mais c’était compter sans le prince nomade qui revint dans la salle.

- ha là là là là.. y’a pas moyen d’être tranquille ici ! Séreste ???
- oui votre altesse ?
- préviens la garde, aujourd’hui je ne reçois plus personne, fermeture des bureaux !
- bien votre altesse, je vais m’en occuper.
- hmm.. bon alors Jared, tu as laissé partir ta fiancée ?

31.

Jared avait regardé l’étrange escorte s’éloigner puis en soupirant était revenu auprès du sultan. Il devait régler ses conflits avec ce dernier, puisque tel était le devoir d’un dirigeant du peuple. Et oublier ses différents envers le sultan de Djamila. Mais à présent la tâche lui serait bien moins aisée. De toute façon, il n’avait plus le choix. Jared revint donc auprès de Semoa, affichant une expression de circonstance. Il devrait faire preuve de la plus grande diplomatie pour aplanir les relations entre lui et le sultan.

- Votre altesse, je suis navré de cet incident qui ne fait qu’ajouter à ces problèmes qui m’ont mené jusqu’à vous.
- Allons Jared, entre nous, appelle moi Semoa. C’est vrai que tu as le chic pour t’attirer des ennuis, on dirait. Enfin la fille était très jolie, je ne peux pas t’en vouloir. Mais tu l’as dénichée où celle-là ? J’ignorais que tu fréquentais les gens de Sunliao.
- euh elle était en voyage, je l’ai croisée par hasard.
- un heureux hasard alors, même si son mari est revenu juste à temps, avant que tu ne la détournes du droit chemin.
- ce n’était pas mon intention !!
- ah non ? Bon dis-moi que me vouliez-vous tous les deux ? Avant que l’autre zouave s’en mêle ?
- il fallait que nous parlions de cette affaire de diamant volé.
- hmm.. je ne suis pas sûr de vouloir entendre ce que tu as à me dire.
- c’était une erreur de croire que j’ai voulu vous voler, voir même vous tromper, tout comme c’était une erreur de votre part de me faire jeter dans vos prisons.
- dis-moi Jared, si tu es venu pour discuter avec moi, ou pour me faire des reproches ? Car si c’est le cas, je pourrais t’en faire moi aussi. Ce que ton frère a fait, ou la façon dont tu t’es échappé de prison, j’aurais très bien pu te faire enfermer sur le champ !
- oui, je sais bien.. je suis désolé, je voulais justement expliquer le pourquoi de ce geste, et m’en excuser.
- des excuses, tu en es bien certain ? C’est bien la première fois que je vois le prince des nomades s’excuser.

Jared serra ses poings, et se remémora les paroles de Kasuke, afin de ne pas perdre son calme.

- Il faut bien une première fois à tout. Mais en attendant, il faut que vous sachiez que j’aurais préféré en parler avec vous, plutôt que de m’évader comme un vulgaire voleur. Seulement vous étiez bien trop préoccupé par ce vol de diamant, et trop aveugle pour voir que moi j’avais simplement essayé de vous aider.

Soudain le sultan s’emporta et pointa son doigt sur Jared :

- doucement mon garçon, tu t’emportes encore une fois !
- Il faut dire les choses comme elles sont.
- Mais tu as quand même un sacré toupet ! Tu t’évades de mes prisons, et à présent soit disant tu viens me faire des excuses alors que c’est tout le contraire que j’entends ! Tu sais que je n’ai guère de patience, alors est-ce que c’est vraiment des excuses que tu viens me présenter ?
- oui, des excuses et surtout des explications.. Ce jeune homme qui m’accompagnait..
- le saltimbanque..
- oui.. c’est lui qui a endormi la vigilance des gardes, j’ai donc profité de l’opportunité qu’il m’offrait, car il me fallait retourner auprès de mon peuple avant qu’ils n’apprennent la nouvelle.
- quelle nouvelle ?
- celle de mon emprisonnement dans vos geôles. Comment pensez-vous qu’ils auraient réagi en sachant cela ?
- hmm effectivement, ça aurait pu être gênant. Donc finalement, je devrais te remercier, si je te comprends bien ?

Jared avait bien senti l’ironie de ces propos. Il fit la grimace, décidément, il n’était pas doué pour des excuses.

- non, je vous demande simplement d’excuser mon geste qui fut, je le reconnais, inconsidéré.

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11.

Semoa se mit à sourire de façon diabolique. Ils en venaient finalement là où il avait voulu mener cette conversation. Le prince Jared malgré ses explications avait mal agi. Bon Sémoa aussi comme bien souvent, s’était un peu emporté en faisant enfermer le prince des nomades. Quoiqu’il en soit, en ce moment même, Jared devait se sentir redevable envers le sultan ou tout au moins, près à accepter la demande que le sultan avait à lui faire.

Car c’est qu’il avait bien réfléchi le sultan depuis le début des travaux qui aboutiraient à la 8ème merveille de ce monde, les merveilles de Suliman, surtout depuis qu’Ankhor lui avait rapporté qu’ils rencontraient de sérieux problèmes pour faire parvenir le beau marbre blanc depuis les carrières djamiliennes à l’ouest du pays. Il avait appris toujours par l’intermédiaire d’Ankhor, qu’on pouvait aussi trouver un marbre de qualité sur les hauts plateaux situés à la croisée des chemins, territoire nomade.

Certes c’était le double du chemin nécessaire pour faire parvenir le beau marbre jusqu’à Jawharia, mais puisque Toute en Plastik s’obstinait à ne pas lever son embargo sur le marbre blanc qui devait transiter par Mysr’Râ, il n’avait plus le choix. Mais Semoa pouvait se montrer très rancunier, et il comptait bien faire payer à la belle pharaonne son entêtement.

Se souvenant de l’arrogante femme, la peste l’emporte, Semoa posa sa main sur l’épaule de Jared, même s’il faisait au moins vingt centimètres de plus que lui. Le regard brillant d’intérêt, il exposa alors à Jared, comment il parviendrait mieux à lui pardonner.

- oui oui, bon je comprends, on a tous fait des erreurs de jeunesse. Mais ne t’inquiète pas, je ne te tiendrai plus rigueur de ça. Oublions, d’accord ?

Semoa ignora le regard surpris et dubitatif du nomade et poursuivit sur sa joyeuse lancée.

- du reste j’ai des projets à te montrer..

Et tout en bavardant, Semoa l’emmena jusqu’à la salle où trônait la maquette du chef d’œuvre d’Ankhor.

- alors tu vois, c’est magnifique non ?
- euh oui. Tout à fait… c’est euh .. impressionnant !
- N’est-ce pas ?
- et où trouvez-vous la main d’œuvre pour construire tout ça ?
- allons, on peut se tutoyer, on est ami à présent ! La main d’œuvre, c’est simple, toute la racaille de Djamila y travaille, au lieu de se prélasser dans mes geôles.
- se prélasser.. hmm
- oui futé le Suliman hein ?
- ma foi..
- alors bon vois-tu.. il se trouve qu’il me fallait le meilleur marbre pour construire le plus bel édifice de Liberty Human..
- j’imagine oui..
- oui mais là, le hic..
- ah ?
- le hic qui s’appelle Toute en Plastik !
- la pharaonne de Mysr’Râ ?
- oui !! cette vieille chipie.. Elle empêche mes marchands de traverser ses territoires. Alors voilà pourquoi au fond tu tombes très bien…
- moia ??
- oui oui parfaitement toi ! Ankhor m’a parlé des carrières de marbre situées sur les plateaux de la croisée des chemins, en plein sur ton territoire.
- oui c’est juste, mais je ne vois pas pourquoi je tombe bien, tu as tes marchands, et moi les miens. Ils sauront bien s’arranger entre eux pour..
- oui oui c’est certain.. Mais.. tu comprends, j’aimerai être sûr de voir ce marbre arriver rapidement. Je sais qu’en ce moment, les routes de Djamila sont loin d’être sûres et..
- et la route la plus sûre est celle qui traverse Mysr’Râ.
- oui… mais il faudrait éviter de passer chez cette .. sorcière. Sinon elle va encore faire blocus, et je n’aurai de nouveau plus de marbre pour mes merveilles.
- Serais-tu en train de me demander de m’occuper personnellement de ce convoi ?

Semoa adressa alors un large sourire au prince nomade, lui tapotant le dos.

- voilàààààà, tu as tout compris. Si le prince des nomades en personne veille sur cette précieuse marchandise, je suis sûr d’obtenir très vite ce marbre.
- c’est que il me faut m’occuper des affaires de mon pays.
- hé bien tu le feras aussi, justement tu pourras profiter de ce voyage pour voir comment se porte ton peuple et… et contrôler les grandes routes qui traversent ton territoire.

En fait, il n’y avait pas tant de route que ça, surtout un vaste désert, mais Semoa s’efforçait de flatter le prince afin qu’il acceptât sa requête. Et puis il n’allait quand même pas lui refuser cette demande ! Pas après ce qui s’était passé !

Viens de

Madeleine se sentais toujours coupable et honteuse vis à vis de Karayan et n’essaya pas de rompre le silence que l’amazone avait instaurée. Ce silence lui permit de se vider le cœur et surtout d’analyser les causes et les conséquences possibles de cette situation.

La chevauchée effrénée continua pendant trois jours et trois nuits, mettant à rude épreuve les montures, ne s’arrêtant que pour les faires boire ou pour passer la nuit. Bien entendu la jeune femme s’installait à l’opposé de l’ancienne mercenaire. Celle-ci bien que comprenant une telle réaction, ne pouvait s’empêcher de le vivre mal et de se sentir un peu plus seule encore. Un soir elle profita d’une partie de chasse pour pleurer… chose inconcevable pour une guerrière. Mais là c’était la goutte d’eau qui faisait déborder le vase ! Elle décida de fermer son cœur à tout ce passé, oublier ce sentiment de solitude, ne plus penser à quiconque d’autres qu’à, Karayan et le Prince des Nomades s’il était possible pour elle de le rencontrer.

Madeleine mit une heure de plus que pour ses autres prises. Seulement, sa sœur d’arme ne lui posa pas de question, restant dans son silence. Mais là, cela ne la toucha pas, ce qui la surprit presque. Cependant, ce ne fut rien quand elle entendit la voix de l’amazone lui demander ce qu’elle comptait faire. Elle resta là, figée telle une statue sa proie pendant le long de sa jambe un instant. Puis se reprenant, elle posa l’animal au sol et répondit d’un ton un peu sec :
- Mais je t’ai déjà répondu ! Je t’ai dit avant notre départ que je souhaitais rencontrer le Prince des Nomades. Enfin si tu es d’accord pour que je reste avec toi ! Sinon je me débrouillerais t’inquiète pas !
- Pourquoi le Prince et pas le Sultan ? fit-elle du tac au tac d’un ton tout aussi sec.
- Parce qu’il me semble le mieux placé pour m’aider. Mais si tu ne veux pas, dis le directement, je comprendrais. Et comme je te l’ai dit je me débrouillerais très bien seule.
- Hummm… d’accord ! On repart après avoir finit de manger ta chasse.
- Parfait !

Madeleine dépeça son butin puis le fit cuire. Pendant ce temps, l’amazone s’occupa des deux chevaux. Le repas se fit toujours sans un mot, sans un échange ne serait-ce que du regard. Leur chevauchée continua jusqu’à la capitale du Sultanat. Elles traversèrent les rues sans vraiment s’arrêter jusqu’au Palais. Là les soldats lui demandèrent d’attendre le temps que leur dirigeant soit mit au courant et leur donne des instructions.

32.

Jared n’en revenait pas. Il avait beau être habitué aux lubies du sultan, ce qu’il venait de lui demander là, dépassait tout ce à quoi il s’était attendu. Et naturellement le rusé renard profitait de son avantage sur le prince pour lui demander une faveur qu’il savait que Jared ne pourrait refuser, pas après la conversation qu’ils venaient d’avoir.

La Pharaonne Toute en Plastik, il la connaissait de même qu’il connaissait sa fille. Combien de fois ne l’avait-elle pas convié à un gala, ou fastueuse réception ? Ou encore à rendre visite à sa fameuse précieuse princesse ? Enfin à présent, il fallait considérer celle-ci comme une reine. Mais à chaque fois, Jared s’en était sorti d’une pirouette, évitant le pénible face à face avec une princesse, enfin non avec une reine dont on disait d’elle qu’elle avait fait tourner en bourrique plus d’un prince, par ses caprices. Ce qui lui fit songer soudain à Semoa et un sourire s’esquissa sur son visage.

- ahh je vois que mon idée te plait finalement !

Jared sursauta, tout à ses réflexions, il en avait un peu oublié la demande du sultan. Il ne put cacher sa contrariété derrière un sourire de circonstance.

- elle me plait.. euh oui moyennement, il serait bien plus simple de passer par Mysr’Râ, mais je comprends tes réticences.

Le prince poussa un soupir résigné, et fit un nouveau sourire crispé.

- bon soit, je vais m’occuper de ce marbre, envoie-nous ton architecte là.. Comment c’est son nom déjà ?
- Ankhôr.. c’est Ankhôr Loui.. Ahh me voilà soulagé d’un lourd fardeau..

Semoa s’esclaffa et comme Jared fronçait les sourcils, il lui expliqua..

- marbre, lourd, fardeau…. Le marbre c’est lourd donc.... oui bon pas grave. Alors je vais faire venir Ankhôr et on va arranger ça au plus vite. Cette Toute en Plastik ne m’empêchera pas de construire la plus belle merveille qui soit, et ça sera grâce à toi mon ami, grâce à Jared ! Le prince des Nomades, ajouta le sultan avec emphase.

Mais Jared n’en était pas plus enchanté. Le sultan brusquement cria derrière lui..

- Séreste !!!! Séreste, où es-tu ??? Tssahh ces scribes, jamais là quand on a besoin d’eux.. Aaah te voilààà.. Fais venir Ankhôr, immédiatement !
- Votre altesse, je vous annonce une nouvelle visite.
- quoiaa ?? Encore ?!!
- non cette fois il s’agit de deux amazones, mais ne vous inquiétez pas, je vais de ce pas chercher Ankhôr.

Jared qui avait suivi cet étrange échange en fronçant les sourcils, ouvrit de grands yeux stupéfaits.

- des amazones ? Et ont-elles dit leurs noms ?
- Oui, l’une d’elles dit être Karayan et venir au nom d’Antiope.

Le prince en resta sans voix. Alors voilà qu’elle revenait au palais ? Mais pourquoi ? Il n’était pas près d’oublier la manière dont elle avait quitté la salle quelques semaines auparavant..
C’était en quelque sorte une histoire qui se répétait… Surpris, Jared ressentit aussi de la colère en se rappelant de la jeune femme, une colère qui s’était un peu atténuée avec le temps, mais qui tout à coup se réveillait brusquement.

Amazones Nombre de messages : 98 Points : 45 Date d'inscription : 16/02/2008

45.

Le ton utilisé par Madeleine lui fit froncer les sourcils. Elle ne s’attendait pas à se faire remballer aussi sec pour une simple question. La guerrière prenait des risques à s’adresser ainsi à sa consœur. Mais au fond cela l’arrangeait. La nouvelle amazone souhaitait se débrouiller seule ? Et bien soit, elle allait être servie ! Karayan n’était pas du genre à s’embarrasser de principe, ni à se prendre la tête inutilement.

Sur ce, elle mangea de quoi tenir pour la journée et après avoir effacé les traces de leur bivouac, se mit très vite en selle, et cette fois sans même s’assurer que Madeleine suivait, Karayan talonna sèchement Pégase qui s’élança telle une flèche, contrarié à son tour d’être ainsi traité.
Elles n’en atteignirent que plus vite le palais et à peine laissé leurs montures au palefrenier, que Karayan demanda audience auprès du Sultan.

Seulement elle ne s’attendait pas à tomber nez à nez avec le prince, en plein conciliabule avec le sultan. A croire que tout ce temps, il n’avait pas quitté le palais. Pour un peu, elle lui aurait presque posé la question. Mais il fallait d’abord faire face à l’étiquette qui exigeait de sa part qu’elle salua bien bas le sultan de Djamila.

- Votre altesse.

Elle échangea un rapide regard avec Jared et le salua à son tour, d’une simple inclinaison de la tête. Mais le regard échangé en disait long.

- Tiens revoilà nos amazones ! Alors je vous manquais que vous êtes déjà de retour ? Pourtant la dernière fois que vous nous avez quittés, vous sembliez bien pressée !

Karayan inspira le plus discrètement possible, serrant ses poings qui la démangeaient déjà depuis un bon moment. Elle aurait préféré pouvoir discuter avec le prince à part et pas devant cet homme qui avait un don certain pour l’agacer. Quoique le prince ne s’en tirait pas à meilleur compte. *Il faut que je me concentre sur le but de ma visite*

- J’étais effectivement très pressée, car ma présence était uniquement due au message que je devais vous délivrer de la part d’Antiope. Une fois que cela fut fait, il me fallait poursuivre ma route afin de livrer le même message aux autres peuples de Liberty Human.
- mais ne me dites pas que vous avez déjà fait tout ce voyage ?
- non.. Les vestaliens m’ont empêchée de mener à bien ma mission..

Karayan s’interrompit. Le sultan n’était pas concerné par tout cela puisqu’il avait refusé de leur apporter son aide. C’était au prince qu’elle voulait en parler.

- mais si je suis ici aujourd'hui, c’est uniquement pour rencontrer le prince Jared. Et à l’oasis des Mirages, on m’a dit que je le trouverai en votre palais.
- Haa, encore une qui ne jure que par toi Jared ! J’ignore ce que tu leur fais, aux femmes, mais elles ont l’air d’apprécier.

L’Amazone vira au rouge presque pivoine. L’odieux personnage, si seulement il n’avait pas été sultan, il aurait déjà perdu la vie. *concentre-toi sur ta mission !*
Il lui fallait attendre l’avis de la personne concernée à présent.

33.

Jared ne lâchait pas Karayan des yeux, regard noir qui brillait d’un étrange éclat. Il aurait voulu se retrouver seul avec elle pour lui dire ce qu’il n’avait pas oublié la façon dont elle était partie, la dernière fois qu’ils s’étaient vus, le laissant dans une bien mauvaise posture.
C’est pourquoi quand le sultan lui adressa cette petite plaisanterie sur son charme masculin, il ne put que répondre par un sourire crispé, fusillant à nouveau du regard, Karayan qui croisait le sien.
Puis comme le silence semblait un peu trop se prolonger, il se décida enfin à parler :

- Karayan… tu..vous vouliez me voir ? Peut-être craignez-vous que je ne tienne plus ma parole après notre dernière conversation ? Ou plutôt devrais-je dire après la dernière fois que nous nous sommes vus. Peut-être êtes-vous venue vous assurer que je vous prêterai toujours mains forte dans ce conflit qui doit opposer les Utopiens aux Vikings ?

Il la vit redresser fièrement le montant pour lui répondre :

- Non, ce n’est pas pour ça, je savais que je pourrais compter sur votre promesse. En fait le problème est tout autre, mais pourrions nous en parler en tête à tête ?

Jared afficha un sourire ironique.

- inutile, le sultan Suliman peut très bien entendre ce que vous avez à me dire.

D’un coup d’œil vers le sultan, il vit que celui-ci appréciait fort sa réponse, croisant sur ses bras sur son ventre, avec un grand sourire. Revenant à Karayan, celle-ci n’avait pas bronché, excepté un froncement de sourcil.

- Madeleine qui m'a accompagnée jusqu'ici, pourra très bien le tenir informé des derniers évènements. L’affaire est urgente, et je n’aimerai pas perdre de temps. De plus, elle a une demande à vous faire, votre altesse.

Jared haussa un sourcil intrigué, de même que Sémoa qui aussitôt s’approcha de l’amazone dénommée Madeleine pour l’entraîner plus loin vers un autre salon attenant, laissant ainsi Jared en tête à tête avec Karayan. D’après le sourire qu’il affichait, il devait espérer séduire la jolie rousse à défaut de Karayan. Finalement c’était tout aussi bien ainsi. Au moins, Jared pourrait-il adresser ouvertement ses griefs contre l’amazone. Il la dévisagea un instant en silence, avant de se détourner brusquement d’elle pour s’approcher d’une des fenêtres en arcade.

Il lui en voulait d’être partie aussi rapidement la dernière fois. Non pas qu’il comptait sur elle pour le sortir de la fâcheuse situation dans laquelle il s’y était mis tout seul, mais juste parce qu’ils n’avaient pas eu le temps de parler vraiment, qu’il n’avait pas eu le temps de lui dire qu’il aurait espéré la revoir. Finalement ces derniers mois, il l’avait effacé de sa mémoire, enfin c’est ce qu’il croyait.

Amazones Nombre de messages : 98 Points : 45 Date d'inscription : 16/02/2008

46.

Karayan le regarda se détourner d’elle. Visiblement, il lui en voulait pour son départ précipité la dernière fois. Tant pis, il pouvait bien lui en vouloir, elle n’avait pas à se justifier d’avoir simplement voulu remplir sa mission et d’en avoir eu assez de perdre son temps auprès de ce sultan. Seulement à présent, il devait l’écouter, que cela lui plaise ou non.

- Prince Jared, vous me voyez navrée de bousculer un peu cette rencontre mais.. Je n’ai plus un instant à perdre. La reine Antiope est en route pour Vestalia et je dois la rejoindre au plus vite.

Elle soupira avant de commencer à lui raconter :

- Il s’est passé beaucoup de choses depuis la dernière fois qu’on s’est vu.
- ça je ne te le fais pas dire Karayan..

Surprise, elle leva la tête pour le dévisager, mais il fixait obstinément le paysage par delà la fenêtre.

- j’avais une mission à remplir, vous le savez ! J’avais déjà perdu trop de temps en cherchant ce fichu diamant.
- je sais.. je t’écoute, raconte moi donc ce que tu as fait tout ce temps.

Karayan fit la moue, et se lança donc dans le récit de leur voyage vers Vestalia, l’accident de Madeleine, les soins prodigués par Finn, la vieille amazone et enfin l’attaque des vestaliens, leur enlèvement, le message à remettre à Antiope et sa nouvelle mission.

- ainsi tu n’as plus besoin de mon armée ?
- non, ce n’est pas ce que je voulais dire… pour l’instant il nous faut attendre.. Voir ce que donnera la visite d’Antiope à Vestalia Imperii.
- et ensuite ?
- nous aviserons… je ne peux vous dire ce que décidera Antiope. Mais en tout cas, elle n’a pas apprécié que les vestaliens renient le pacte ancien.
- en effet, c’est inadmissible.. même si je trouve cela étrange.. Quel intérêt les vestaliens auraient –ils à ce que les vikings s’emparent d’Utopia ?
- je l’ignore.. un arrangement commun peut-être.
- Bien… de toute façon quoique ta reine décide, sache que mes armées sont à la disposition du peuple de Liberty. Je défendrai toujours la cause de la liberté, avant mes propres intérêts..

Karayan lui sourit, touchée par ces belles paroles.

- et la reine vous en saura infiniment gré.
- et toi ?
- moi ?
- que vas-tu faire à présent ?
- il faut que je parte à Vestalia, rejoindre Antiope. C’est les ordres que j’ai reçu avant mon départ.
- mais c’est très risqué. Les vestaliens ne vous ont-ils pas bien fait comprendre qu’ils ne souhaitaient plus vous voir intervenir dans cette guerre ? Tu as déjà été enlevée une fois, c’était un avertissement. Que feront-ils la prochaine fois ?

Karayan resta songeuse un instant.

- Je n’ai pourtant pas le choix, il faut que je rejoigne mes sœurs à Vestalia.

A Ecouter merci ^^

Karayan partit au grand galop sans faire attention si sa sœur d’arme la suivait. Madeleine ne s’en offusqua pas et prit le temps nécessaire pour faire disparaitre toutes traces de leur passage avant de reprendre la route à son tour. Elle traita sa monture avec un peu plus de douceur dans ses gestes mais dut lui demander un effort supplémentaire pour rattraper la guerrière avant d’arriver aux portes de la cité, puis du palais.

Les deux jeunes femmes furent rapidement menées devant le maître des lieux… et, à leur plus grande surprise, le prince des Nomades. Madeleine ne put s’empêcher de penser que sa présence était un heureux hasard et que son départ n’en serait que plus rapide pour Ur. Elle fut moins ravie quand après avoir salué les deux hommes selon leur rang, Karayan annonça à tous, que ca serait à Madeleine de donner des explications au Sultan. De suite, l’homme descendit de son trône, s’approcha d’un pas décidé et l’emmena dans un salon moins protocolaire. Celui-ci était occupé par des femmes habillées de voiles richement décorés suggérant plus leur forme qu’ils ne les montraient. D’un geste, plus large que nécessaire, il les congédia avant même qu’elles ne l’aient salué avec déférence.

Avec de grandes manières, il s’assit sur un coussin posé à même le sol et demanda à son invitée d’en faire autant à ses côtés. Bien que pas très enchantée à cette idée, l’ancienne mercenaire dût se résoudre à répondre positivement à l’offre qui lui avait été faite. De suite, son vis-à-vis lui demanda de raconter leurs péripéties depuis leur départ du royaume. Madeleine obtempéra, ne dévoilant aucun détails tant sur ses mésaventures que sur leur évasion. Le sultan n’avait aucun besoin de les connaître, et puis plus vite, elle aurait sa réponse, plus vite, elle s’en irait rejoindre Adès. Bien que les souvenirs lui revenaient à l’esprit, elle se garda de montrer les émotions qui l’envahissait un peu plus à chaque seconde. Sans parler du malaise qui s’installait entres eux : à chaque fin de phrase, Sélam tentait de se rapprochait de la guerrière. Quand elle eut raconter comment Adès était devenue le nouveau roi de la Cité d’Ur, le Sultan mit un instant avant de réagir :
- Ce n’est pas possible, très chère ! Ur ? ce n’est qu’une histoire pour enfants, une légende créée de toutes pièces par nos meilleurs conteurs, dit-il en lui prenant la main.

Madeleine eut envie de la lui retirer sèchement avant de lui l’envoyer sur sa joue, mais s’en abstenue. Elle se contenta de la faire glisser sous la sienne tout en lui souriant, et de la poser sur sa cuisse :
- Je crains que son Altesse ne se trompe. La reine Antiope m’a chargé de transmettre un message de la plus haute importance à leur nouveau roi. Et je puis vous assurer que cela n’est point faribole, je vous ai narrer sa découverte à l’instant. Est-ce que son Altesse accepterait de m’aider ?
- Et comment puis-je faire cela ma jolie ? lui demanda t-il se rapprochant à nouveau de la jeune femme.

La guerrière prit une grande inspiration et évita de reculer trop brusquement pour ne pas le heurter et ainsi perdre la seule chance d’obtenir son aide. Il était clair que cet homme avait un don pour énerver.
- Et bien, Votre Altesse, en me permettant de parler à vos Anciens ou bien de consulter votre bibliothèque, afin de m’enquérir du chemin à suivre pour parvenir à ma destination le plus vite possible. Je ne puis me permettre de rester trop longtemps ici.

L’ancienne mercenaire resta là, un (très) léger, sourire sur les lèvres, attendant la réponse du Padischah, en pensant à sa future rencontre avec son ancien compagnon de route. Sa patience bien que mise à rude épreuve par le silence imposé par son hôte, elle resta de marbre : ces dernières aventures l’avaient rendu plus déterminée que jamais et surtout plus renfermée niveau émotions.

Invité

12.

Rah, elle s'entêtait à jouer les vierges effarouchées. Semoa comprit qu'il ne parviendrait à rien avec cette rouquine. Elle ne voulait parler que boulot, et point question de bagatelles. Si les amazones étaient réputées pour avoir dans leur rang, les plus belles femmes des terres libres, elles étaient aussi réputées pour leur fichu caractère.. oui des guerrières, m'enfin bon, il en avait connu de plus conciliantes, plus calines et prêtes à passer quelques agréables moments en sa compagnie..

Enfin bon, ça ne serait pas pour cette fois, et pas avec cette... Semoa recula sur son coussin.. Il avait déjà oublié le nom de l'amazone. Il se redressa avec énergie et frappa dans ses mains..

- Séreste!!!

Puis comme la porte s'ouvrait sur son fidèle serviteur, il se tourna vers la rouquine.

- Lui va te donner les renseignements que tu souhaites.. il connait tout de notre pays, et si la cité dont tu parles existe, il saura te l'indiquer.

Séreste qui avait manqué une partie de la conversation, regardait le sultan et la jeune femme tour à tour.

- Séreste, tu dois bien avoir des cartes de notre royaume?
- oui bien sûr, votre altesse. Enfin pas moi, mais nos scribes... Ils possèdent toutes les cartes dessinées à ce jour de Liberty.. Que cherchez vous en particulier?
- mademoiselle aimerait se rendre à Ur, répondit Semoa sur un ton narquois, et gloussa encore en songeant à l'idée de l'amazone.
- ah oui.. Ur.. Oui, je pense que les scribes pourront vous montrer ce qu'ils ont sur ce royaume.

Semoa cilla, et perdit son sourire. Alors ce n'était donc pas une cité légendaire? Elle existait bel et bien? Naturellement, il n'osa pas demander une confirmation, car ça aurait signifié combien il était ignare en matière d'histoire et de géographie libertienne. Dans ce cas, il valait mieux s'abstenir de commenter. Il s'exclama soudain en posant son bras sur la chutte des reins de la belle amazone qui s'était levée à l'apparition de Séreste:

- Bien!! Dans ce cas ma jolie, voilà tes désirs réalisés. Séreste, vas donc avec elle et fais en sorte qu'elle retrouve son chemin...

Il fit ensuite face à l'amazone, et prit sa main dans la sienne pour un baise main des moins conventionnels, laissant errer ses lèvres à loisir sur la peau douce et pâle..

- J'espère que cela te convient?...hm.. transmets donc mes amitiés à ta reine.. Qu'elle vienne me rendre visite quand elle le souhaite. J'apprécie toujours les visites des amazones, et ça vaut pour toi, hein?.... Allez bonne chance!

Semoa fit un signe de tête à Séreste qui emboîta alors le pas à l'amazone. Le sultan les regarda quitter la pièce, et soupira... Il enviait le charme de Jared auquel, il en était persuadé, cette rouquine n'aurait pas résisté...

34.

- Alors laisse-moi t’accompagner !
Karayan releva son visage pour croiser son regard. Le prince lui sourit..

- Il y a un camp à la sortie de la ville, mes troupes m’y attendent. Certains de mes hommes feraient la plus efficace des escortes pour toi, jolie amazone. Tu serais certaine d’arriver sans encombre à Vestalia.
- mais prince Jared, vous devez avoir vos propres responsabilités. Vestalia n’est pas vraiment proche des terres nomades, c’est un grand voyage, long et fatiguant, je ne pourrai pas beaucoup m’arrêter.
- Alors raison de plus !! Ne refuses mon aide, tu sais que mes hommes pourraient être utiles à Liberty human, c’est pour la bonne cause.

Il savait que c’était là des arguments qu’elle ne saurait réfuter. Il vit à son expression qu’il avait gagné.

- Bien.. Je crois qu’il faudrait partir le plus vite possible. Pensez-vous que le sultan s’offusque si l’on partait sur le champ ?

Jared fit la grimace, le sultan, il l’avait presque oublié.

- ah oui le sultan.. hé bien……

Son regard s’alluma d’une lueur amusée..

- non, on est bons amis lui et moi à présent… Il comprendra.
- très bien, alors si vous permettez, ne perdons plus de temps !

Jared sourit :

- Après toi, ma chère…

Il se sentit soudain soulagé. D’une part, il pourrait veiller sur la jeune femme, surtout face à la menace qui pesait sur elle, et d’autre part, il évitait ainsi cette corvée que lui avait confié le sultan.. jouer les convoyeurs de marbre, c’était tout de même moins important que veiller à maintenir la paix sur Liberty. Néanmoins par égard pour le sultan qui semblait encore occupé avec Madeleine, le prince nomade laissa un message à l’un des gardes à transmettre au sultan une fois qu’ils seraient partis.. Il ne fallait surtout pas déranger son altesse en plein conciliabule avec une aussi jolie femme que Madeleine. Cependant Jared ne pouvait pas deviné que Madeleine avait déjà quitté elle-même le palais.

Bientôt deux cavaliers passèrent sous les hautes portes voûtées de Jawharia, et prirent la direction de l’est.

( A suivre sur les routes de Djamila)

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